Europe - Les autres Balkans - « Rod*» trip dans les montagnes maudites - Carnet de voyage

Dominique, Jacques , Jean-Claude et Philippe

Pêche à la mouche et découverte du Nord des Montagnes maudites, Albanie Monténégro Kosovo

Quatre retraités aveyronnais partent à la découverte des richesses des rivières des Monts maudits ; ces montagnes à cheval sur trois pays L’Albanie, le Monténégro et le Kosovo.

Entre paysages somptueux, rivières aux eaux cristallines mais violentées par les captages et les pollutions plastiques, ils trouveront aussi une magnifique population d’ombres.

Pas qu’halieutique ce voyage sera aussi culturel et surtout marqué par l’émotion qui étreint celui qui ne connaît pas l’accueil à l’Albanaise.

Pêcher les salmonidés dans les Balkans est souvent synonyme de Bosnie ou Croatie, c'est oublier un peu vite que les Alpes Dinariques courent tout le long de l'Adriatique jusqu'aux frontières de la Grèce. C’est la partie à cheval entre l’Albanie, le Kosovo, le Monténégro qui concentre les plus hauts sommets de cette chaîne de montagne. Elles se nomme « Beshkët e nemuna », les montagnes maudites en Albanais.

Cette méconnaissance vient peut-être du fait que les pays du sud des Balkans n'ont pas encore mesuré la richesse de leur capital halieutique ou qu'ils ne l'ont pas mis en valeur, vous ajoutez des situations économiques et sociales qui souffrent encore des années de guerre ou des dictatures passées et vous avez ainsi des régions peu explorées, aux paysages sublimes et aux rivières d'un bleu turquoise époustouflant.

Bien sûr, tout n'est pas si idyllique, et si on prend le soin de s'approcher et de regarder, force est de constater que de nombreux obstacles subsistent, par ignorance, manque de moyens, structures inadaptées ou inexistantes. Mais l'âme de ces trois pays, Albanie, Monténégro, Kosovo vous prend aux tripes dès que vous pénétrez ces régions peu fréquentées où l'accueil est profondément humain et convivial malgré la barrière de la langue.

Le voyage, nous l'avons conçu comme une aventure découverte en trois étapes, une par pays avec la volonté de découvrir des vallées et des rivières méconnues ou ignorées.

Pour entrer dans ce périple, nous sommes partis de Marseille direction Tirana pour un vol de deux heures.

Notre premier objectif : la vallée de la Cemi (Cijevna) qui prend sa source à Kelmend en Albanie et se jette dans la rivière Morača au Monténégro.

Nous y accéderons après un voyage de quatre heures, car ici les distances se mesurent en heure et une pause déjeuner à Shkodër au Shquiponja restaurant au bord de la Drin. Nous retrouverons cet énorme fleuve de 150 mètres de large aux eaux bleues puissantes en fin de voyage. Il mériterait une exploration halieutique, une autre fois.

Nous remontons vers le Nord par la E762 puis la SH20 jusqu'au point de vue sublime de Leqet et Hotit, la Cémi coule 800 m plus bas , ruban vert émeraude de Tamarê jusqu'à la frontière du Monténégro. Tamarë, notre prochain arrêt est là-bas à .... une heure de route. Nous longeons la Cemi jusqu'à Tamara, c'est une rivière puissante, d'une trentaine de mètres de large aux eaux cristallines dont le fond calcaire reflète des tons bleu-vert.

Nous sommes accueillis les bras ouverts par Turi et sa famille dans un gîte entièrement neuf où le paysage absolument sublime de la vallée de la Cémi s'offre à nos yeux.

L'urgence étant de pêcher cette superbe rivière, Turi se propose de nous accompagner au bord de l'eau et à notre question où et comment pêcher, son fils nous annonce simplement que la meilleure méthode est la pêche de nuit à la frontale et au harpon !!!!!! Cette offre déclinée, nous filons vers notre premier coup du soir.

L'image qui va marquer tout le long de ce périple s'ouvre sous nos yeux au premier arrêt, le cadre est somptueux, les eaux cristallines et la rivière parsemées de millions de détritus de toutes sortes : plastiques, métaux, fils , bouteilles, appareils ménagers ..... La raison est à la fois désolante et compréhensible, les structures de collecte inexistantes depuis des dizaines d'années ont amené les habitants à se débarrasser de leurs déchets comme nous le faisions dans les années 60, les décharges les plus aisées étant .... les rivières.

Nous rencontrerons heureusement un début d'organisation dans des zones plus touristiques avec la distribution de conteneurs et sans doute l'organisation d'une collecte.

Le choix de notre technique d'approche de la pêche, à savoir mouche sèche et nymphe, n'est sans doute pas le meilleur moyen de découvrir la population de salmonidés présents, sous un ciel bleu et des eaux de cristal, l'activité est inexistante jusqu'à la tombée de la nuit où seulement quelques gobages isolés nous permettront de capturer une seule superbe truite fario au coup du soir..

Notre deuxième jour de prospection nous amènera vers Tamara. L’aval de la confluence de la Cemi et d'une rivière de résurgence sortant du parc du « Parku Kombëtar Alpët e Shqiperosë », sera prospecté par deux groupes de deux pêcheurs. Nous avons choisi de pêcher en sèche et nymphe au fil. Peut-être eut il été plus judicieux de prospecter au streamer ou mieux au leurre qui permet une prospection rapide et déclenche plus d'agressivité hors des périodes alimentaires.

La matinée se finit par un capot général au milieu des troupeaux de chèvres gardées par quelques patous peu intéressés par notre présence.

Après une pause désaltérante et un repas à Tamara agrémentés de légumes frais et de chevreau grillé, puis quelques visites du lieu nous repartons pour un coup de fin d'après-midi. Un pêcheur vers l'aval, en sèche, à la recherche des gobages, un photographe. Deux autres voteront pour l'option du gros affluent d'une quinzaine de mètres de large descendant du parc national (Parku Kombëtar). Sur ce cours d’eau, manifestement, le niveau est très haut, seuls quelques profonds à l'abri des falaises permettent de pêcher correctement.

Le moins motivé reste près de la jonction avec l'embouchure de la Cemi.

L’autre remonte un sentier muletier qui longe le torrent rive droite, 200 mètres plus haut enfin, le long de la falaise, deux truites gobent régulièrement de grosses olives, cependant, protégées par un énorme rocher, elles sont inatteignables, un peu plus haut une troisième pointe le nez. Elle aurait mérité une attaque en sèche, mais les nymphes sont montées et la nuit s'approche. Au premier lancer, le poisson plonge, saisit la nymphe puis sur un ferrage appuyé crève la surface dans un secouage de gueule qui a rapidement raison du 12/100, c'est une énorme arc en ciel, inattendue, mais dont la présence est pleine de promesses.

Le pêcheur solitaire de son côté, jusqu'à la nuit tentera vainement de faire monter de nombreuses petites truites sans succès, sous les rires amusés du photographe !

Cette expérience nous laisse plein d'espoirs d'autant que sur le chemin du retour nous croisons un pêcheur local qui au buldo, a capturé trois poissons, preuve de la présence d'une densité de truites qu'il faudra bien redécouvrir... une autre fois.

Au-delà de la découverte, nous avions opté pour une session de trois jours sur la Lim, affluent de la Drin, puissante rivière de 200 km du Monténégro, que nous rejoignons le soir même à Plav. La Lim prend sa source non loin de la Tara, au pied du mont Maglich qu'elle contourne avant d'entrer dans le lac de Plav,, elle se nomme Vrmoša puis Grnčar et enfin Ljuča jusqu'à son entrée dans le lac de Plav puis prend le nom de Lim et file vers l'est.

Eduart notre accompagnateur avait minutieusement préparé ce séjour, et en particulier ces trois jours sur la Lim. Les réservations, parfaitement exécutées, le guide trouvé, il ne nous reste plus qu'à découvrir la rivière.

Oki, notre guide a mis à notre disposition les cartes de pêche pour trois jours, chaque journée coûte 90 euros, comprenant le droit de pêche et le guidage.

La Lim est particulièrement riche en invertébrés, les éclosions sont variées et si nombreuses que les exuvies viennent souvent se coller sur les waders. Bien sûr la densité et la variété de poissons va de pair. La Lim est dans sa section en aval du lac riche en poissons blancs, très riche en ombres, et bien occupée par les huchons. Les truites sont beaucoup moins présentes, sans explication rationnelle.

Les poissons blancs sont surprenants de combativité, on trouve des chevesnes, des hotus (näze) et un cyprinidé apparenté au gardon très actif sur les nymphes, combattants infatigables.

Oki nous explique le fonctionnement et la réglementation de la pêche. Les règles sont strictes, elles ont fait l'objet de plusieurs années de mise au point. Face à une pression de pêche excessive, un groupe de pêcheurs locaux a pris en main la gestion halieutique de la zone.

Au fil des années, les parcours protégés se sont agrandis et les travaux de nettoyage ont permis d'offrir aux pêcheurs un environnement agréable. Cette attitude permet à la réflexion de prendre conscience qu'il n’est pas possible de puiser inlassablement dans le stock de poissons, la pêche pour tous, partout, à tout, tout le temps, sans limites va s'éteindre, la protection de nos rivières passera inévitablement par-là d'autant plus expressément que les conditions climatiques influeront sur la qualité du milieu, limitant ainsi géographiquement les zones de qualité correcte.

Donc pour pratiquer sur ces secteurs c'est sensiblement la réglementation pêche mouche des compétitions internationales qui s'applique :

Canne à mouche, Moulinet mouche (pas de spinning), Soie obligatoire, Hameçon sans ardillon, Épuisette obligatoire et No-kill intégral

Au-delà de cette base, les guides acceptent quelques adaptations telle que la nymphe au fil ..

Cependant cette tolérance ne semble s'appliquer qu'en présence d'un guide, en pêche solo, nous ne sommes pas sûrs que ce soit accepté.

Compte tenu de cette règle, il est souhaitable de se munir de cannes de 9 ou 10 ", soies 3 à 5, pouvant être utilisées en sèche ou en nymphe. La nymphe à vue, sèche/nymphe, la nymphe au guide également et bien sûr la "Roncari".

En abordant la rivière, le repérage des ombres se fait souvent à vue, curieusement les poissons sont peu craintifs (ce qui ne signifie pas qu'ils sont faciles), il est très souvent inutile de pénétrer dans la rivière tant les poissons sont près du bord, reste à passer correctement la nymphe et de choisir le bon modèle, comme toujours.

En sèche, le matin sur les radiers, il est souvent efficace de passer une grosse bicolore sur un n° 12 avec tinsel, nous avons ainsi capturé quelques très jolis spécimens.

Le coup du soir peut être magique, les bons soirs, on peut se trouver face à une trentaine de poissons bien installés, mais ce sont des ombres, toujours aussi fantasques !

Le soir il est tout à fait possible de voir chasser un huchon. L’un d’entre nous sursautera lors d’une bruyante chasse à quelques mètres de lui.

Nous n'avons pas testé les huchons, faute de temps, c'est cependant tout à fait possible avec un taux de réussite correspondant sans doute au nombre d'heures de pêche ....

On peut enfin se procurer sur place quelques nymphes et sèches que se feront un plaisir de céder pour quelques euros les monteurs locaux, et même si vous possédez déjà de quoi satisfaire vos besoins, il est toujours profitable de se laisser convaincre par un local, ne serait-ce que pour les bonnes relations dans la communauté.

Nous avons parlé de la Lim en aval du lac de Plav, en amont elle ne porte pas le même nom, c'est la luça qui plus étroite serpente entre des prairies verdoyantes au milieu des troupeaux de brebis. La densité d'ombres y est aussi impressionnante avec quelques truites en plus. Les méandres se succèdent, très serrés au point qu'il est possible de couper à travers champs et franchir en quelques pas un méandre de 200 mètres.

Plus sauvage et plus agréable, la Luça demande cependant un niveau d'eau assez bas, nous étions alors limite sur beaucoup de spots ce qui rend l'accès à certains postes plus aléatoire.

La densité d'ombres permettra de réaliser de belles matinées avec 5 à 10 poissons et aussi de vivre de belles histoires de pêcheurs.

Jacques prendra ainsi ses premiers vrais poissons à la mouche sous les bons services d'Oki.

Philippe tournera un peu en rond avant de gratifier le groupe d'un combat dantesque sur un très gros poisson.

Jean-Claude pourra s'égosiller à perdre la voix en annonçant au peuple des campagnes, encore et encore et encore un....

Dominique en profitera pour perdre un très gros dont la chandelle restera comme un instantané saisi au vol.

Il faut dans l'idéal prévoir cinq jours de pêche pour profiter pleinement des deux rivières, des ombres et qui sait des huchons.

Eduart, de l’agence ZEMRA TRAVEL, concocte des séjours modulables en totale organisation ou en auto-gestion sans que l'on ne soit jamais isolés, chacun y trouvera son bonheur.

Mais un voyage dans les Alpes Dinariques passe aussi par le Kosovo et le centre de l'Albanie.

Les rivières du Kosovo sont tout aussi attrayantes que celles de l'Albanie, notre visite vers Peja puis la plongée vers les gorges de la Drinn, nous fait découvrir des torrents de cristal, des rivières puissantes, sauvages, hélas toujours jonchées de débris colorés. Mais les poissons sont sans doute là aussi, preuve en sont les trophées du bar des pêcheurs à Peja où nous serons accueillis par Vigan Rugova et Eroll Grapci Président du club de pêche de Pejë, des amis locaux de Philippe et Jacques.

Pas de pêche pour nous car il faut rejoindre Tirana pour le retour.

Mais les projets fleurissent au fil du voyage, il nous faudra absolument découvrir la Shala et la Valbona qui compte tenu de leur isolement et des difficultés d'accès ne peuvent que nous offrir encore des journées pleines de bonheur.

Pour préparer ce voyage nous avons utilisé la Carte de l'Albanie éditée par Reise-Know-How-Maps, elle inclut nos étapes au Monténégro et au Kosovo.

Merci à l’agence locale albanaise ZEMRA TRAVEL dirigée par Eduart CEKOJA

A Oki le guide au Monténégro, Turi et Hana gérants de guest houses et ... tous nos hôtes

Philippe AUGÉ, Jacques BURGUIÈRE, Jean-Claude DURAND et Dominique GENTRIC, les pêcheurs

*Rod = canne à pêche en anglais

 

Dominique, Jacques , Jean-Claude et Philippe (20-08-24)

 


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